30: Neuromarketing : Application Pratique
June 21, 2012 Lettres Philippe Gouillou one response
Tagged with: Cortex • Management • NeuromarketingPouvoir utiliser les neurosciences pour valider sa communication est un luxe que tout le monde ne peut pas s’offrir. Comment faire alors pour bénéficier soi aussi des dernières découvertes en psychologie appliquée ? Comment appliquer les études quand on ne peut pas les faire soi-même ?
Sommaire
- 1. Le Neuromarketing validé en taille réelle
- 2. Comment appliquer le changement de perspective
- 3. Quand l’objectif est le moyen
- 4. Video : la science de la motivation
- 5. Articles cités
Cette lettre avait été envoyée par email le 4 juin 2012 : Abonnez-vous pour les recevoir en temps réel
1. Le Neuromarketing validé en taille réelle
Comme indiqué dans la Lettre 29 (“4. Neuromarketing : Effarant “documentaire” de France 2“), il ne faut pas croire que le neuromarketing serait une arme imparable qui transformerait ses cibles en robots sans volonté propres. En revanche, il ne faut pas non plus faire l’erreur inverse qui serait de le croire inefficace et sans intérêt : les apports du neuromarketing révolutionnent notre compréhension du processus de décision et de comment on peut agir dessus.
Trouvée via le blog de Roger Dooley, une étude de Falk et al. (2012) en apporte une nouvelle preuve universitaire : l’étude a montré que le scan du cerveau de quelques testés a bien prédit le succès d’une campagne alors que l’étude standard par questionnaire de ces mêmes personnes avait donné une fausse prédiction.
L’étude
La campagne testée avait pour objectif d’inciter les fumeurs à appeler un numéro d’aide. Les auteurs ont testé 3 publicités auprès de 15 hommes et 16 femmes de 18 à 69 ans :
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D’abord en leur faisant visionner les publicités sous fMRI (avec d’autres publicités)
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Puis en les interrogeant sur quelle publicité les incitaient le plus à arrêter de fumer
Les résultats ont été très différents, comme montré sur l’image ci-dessus :
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Les réponses conscientes (à gauche) ont donné comme ordre : B, A, C (ie: une méthode classique aurait préconisé utiliser la publicité B)
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Sous fMRI (au milieu) l’ordre était C, B, A avec une bonne avance du C et un écroulement du A
Ils ont ensuite diffusé sur télévision les 3 publicités et ont calculé l’impact sur les appels au numéro d’aide : c’est la courbe de droite sur l’image ci-dessus : seul le scan avait prédit l’efficacité des campagnes, à l’opposé du questionnaire.
En fait, le neuromarketing avait non seulement trouvé le bon ordre mais avait aussi prédit le très mauvais résultat de la publicité A, qui apparaissait pourtant en 2ème position dans l’enquête consciente.
La zone testée sous fMRI était une partie du cortex pré-frontal proche du cingulaire antérieur (voir la Lettre 3: “Le Bouton Achat du cerveau“) qui apparait en vert sur l’image ci-dessous
Les limites de l’étude
Roger Dooley remarque trois limites à cette étude :
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Le nombre de participants (31) est plus que suffisant pour le fMRI mais faible pour le questionnaire
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La technologie fMRI n’est pas la plus utilisée en neuromarketing, du fait de son coût et de ses contraintes
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L’étude ne concernait pas un produit ni une marque mais une action de santé, il se peut que l’étude ne soit pas totalement reportable dans un contexte marketing standard.
Le résultat est cependant net et correspond bien à ce que décrivent les agences de neuromarketing et leurs clients : les techniques neuromarketing sont beaucoup plus fiables et demandent moins de testés que les techniques habituelles.
Application pratique
Pouvoir tester directement l’effet d’une publicité est un luxe que tout le monde ne peut pas s’offrir, mais on n’est cependant pas totalement démuni :
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Se rappeler que, aussi honnête, volontaire et intéressé soit-il, les réponses conscientes données par un testé ne correspondront pas forcément à ses processus profonds et n’ont donc qu’une valeur prédictive restreinte ;
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Même sans test direct, on peut souvent améliorer l’efficacité de sa communication en se basant sur l’extraordinaire richesse de la littérature scientifique. Pour un exemple simple, (re)voyez la Lettre 7: “Une carte de voeux neuromarketing“.
Pour cela il faut accumuler les études, les comparer et en extraire les informations applicables (“Reverse Engineering“). C’est exactement ce que vous propose Neuromonaco : contactez-nous !
Images et Lien : “Neuromarketing Proof? UCLA Brain Scans Predict Ad Success” By Roger Dooley, Fri, Apr 27, 2012
La première image correspond à la Figure 1 de Falk et al. (2012) annotée en couleur par Roger Dooley. La seconde est directement extraite de la Figure 1 de l’article.
2. Comment appliquer le changement de perspective
Dans une conférence de 18 minutes pour TED à Athènes en décembre 2011, Rory Sutherland donne des exemples d’application du Constructivisme psychologique : dès que les besoins fondamentaux sont remplis, ce qui nous importe n’est pas la réalité mais la façon dont nous la percevons (voir la Lettre 22 : “Palo Alto : Paradoxe et niveaux en Communication“).
Il critique notamment la distinction entre une valeur réelle et une valeur perçue, qui serait rajoutée par la publicité : les deux font partie de l’ensemble de l’expérience.
Rory Sutherland se présente comme un “Ad Man” (“Pubeux”). Rentré comme copywriter en 1988 chez Ogilvy, il est maintenant le Vice-Chairman du Groupe (Bio).
Son message en quelques mots : nous accordons trop la priorité aux solutions techniques et pas assez aux solutions psychologiques qui ont pourtant la même importance au final.
Parmi les exemples :
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Si vous voulez qu’un patient prenne 1 pilule par jour pendant 24 jours, il y a de fortes chances qu’il arrête le traitement en cours de route. La solution : coloriez en 6 d’une couleur différente et donnez comme prescription de ne les prendre qu’après les 18 autres. Beaucoup plus iront au bout.
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Le service postal anglais arrivait à faire parvenir en un jour 98% du courrier soit très largement plus que ce que croyait la population. Mais, au lieu d’essayer d’améliorer la perception de sa qualité de service (approche psychologique) il a essayé d’améliorer celui-ci pour atteindre 99% (approche technique). Le résultat a été de casser ce qui marchait et de faire baisser le taux de J+1.
Application pratique
En fait, ce que fait Rory Sutherland dans cette conférence est justement donner des exemples d’application pratique des thèmes abordés dans la Lettre 22 (“Palo Alto : Paradoxe et niveaux en Communication“) et la Lettre 25 (“Vivons-nous dans le même monde ?“).
A retenir : le cadre théorique a toujours une importance pratique.
TED: Rory Sutherland: Perspective is everything (18’24”)
3. Quand l’objectif est le moyen
La Fabrique du Réel propose sous forme de Timeline le détail de la campagne de lancement du prochain film de Ridley Scott, Prometheus.
La campagne avait commencé le 19 décembre 2011 et comprenait notamment le renommage et le décor du 16 au 25 mai 2012 de la station fantôme “St Martin” (Métro Parisien, Ligne 9 : Wikipedia FR).
Il s’agit là d’un nouvel exemple d’une communication qui concentre la notoriété sur elle-même : les gens parlent de la publicité avant de parler du produit. Même si Storytelling la qualifie de “Promesse ratée” (elle n’implique pas la cible), à ce niveau cette campagne est un succès.
Publicité opportuniste
Un autre exemple, plus fréquent et moins coûteux, de cette technique est la publicité opporturniste.
La publicité ci-contre avait bien sûr marqué (avec plusieurs articles), une marque de loueurs a essayé de faire encore plus visible (probablement avec moins d’impact : effet de déjà vu), mais l’exemple récent le plus fort est celui de la boutique Absoloo a réussi à récupérer le buzz autour du lancement d’un jeu en lançant la campagne : “Un Diablo III acheté, un sextoy offert !” (16 mai 2012)
Les risques
Arriver à faire parler de sa campagne de publicité est toujours un grand succès pour la notoriété d’une marque. Cette technique de communication centrée sur la communication risque cependant de se reporter de manière négative sur le produit. Un exemple évident en est la critique du film Prometheus par Laurence Lasserre sur Atlantico : “le film suscite lui une déception à la hauteur de l’espoir généré.“
Liens :
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“Transmédia Marketing : Prometheus, Une étude de cas avec Storify et Timeline” – La Fabrique du Réel - 9 avril 2012
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“Promotion de Prometheus : promesse ratée !” – Storyplaying – 21 mai 2012
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“Prometheus, la vraie fausse promesse de Ridley Scott…” By Laurence Lasserre – Atlantico – 31 mai 2012
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Exemples de publicités opportunistes : “Les présidents, de bonnes mascottes publicitaires ?” By Daniel Robert – Atlantico – 28 mai 2012
Images : Copie d’un écran de la version Timeline et Publicité Wijet dans Le Figaro du 7 mai 2012 : “Hollande raillé par une compagnie de jets privés” – France Soir – 14/05/12
4. Video : la science de la motivation
La remarque de Daniel Pink (sur l’image ci-dessus) est généralisable : le décalage entre ce que les recherches scientifiques découvrent et ce qui est diffusé, connu et utilisé ne fait même que s’accroître.
Dan Pink est l’auteur de : Drive: The Surprising Truth About What Motivates Us
TED: Dan Pink sur la surprenante science de la motivation (18’40”)
5. Articles cités
Falk, E. B., Berkman, E. T., & Lieberman, M. D. (2012). From Neural Responses to Population Behavior: Neural Focus Group Predicts Population-Level Media Effects. Psychological science. doi:10.1177/0956797611434964
Citation de cette page :
Gouillou, Philippe (2012) : "Lettre Neuromonaco 30: Neuromarketing : Application Pratique". (21 Jun 2012) Neuromonaco. Retrieved from https://neuromonaco.com/lettres/lettre30.htm on 20 Dec 2014. 1658 words.
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